Les élections israéliennes ont eu lieu ce mardi 9 avril 2019. Elles ont rendu leur verdict : Benyamin Netanyahou en est le grand vainqueur.
Ces élections législatives ont en fait été un référendum pour ou contre Benyamin Netanyahou, et finalement les électeurs israéliens ont voté pour lui.
Le parti de Benny Gantz et celui de Netanyahou sont au coude à coude s’agissant des résultats, mais Benyamin Netanyahou est en mesure de former une large coalition autour de lui, grâce au soutien de l’extrême droite. Benny Gantz, lui, manque de réserves. C’est sur une coalition pouvant représenter 65 sièges sur 120 que Netanyahou peut compter pour former un gouvernement.
Il va devenir le Premier ministre qui aura été en poste le plus longtemps, battant même le record du fondateur du pays, David Ben Gourion. Ça sera son quatrième mandat successif, son cinquième au total. Le résultat de ces élections montre bien un enracinement, et même une poussée de l’extrême droite ainsi qu’un effondrement du parti travailliste, pourtant parti fondateur du pays, qui ne disposera que de six sièges dans cette nouvelle législature. C’est une défaite historique pour ce parti.
Benyamin Netanyahou avait fait le pari gagnant de la polarisation. Extrêmement clivant, il a mené une campagne très violente, accusant son adversaire de mettre en danger la sécurité d’Israël, alors même que celui-ci fut chef d’état-major des armées.
Comment expliquer que, malgré les différentes affaires de corruption, les enquêtes qui se multiplient, les mises en cause de l’intégrité personnelle de Benyamin Netanyahou, il ait quand même remporté les élections ?
Ce qui explique ce succès, c’est justement la stratégie de polarisation choisie par Benyamin Netanyahou. C’est aussi la conséquence d’une économie israélienne qui se porte bien – même si les inégalités sont de plus en plus fortes. Mais le pays n’a surtout jamais été aussi fort diplomatiquement : Benyamin Netanyahou bénéficie du soutien de leaders comme Donald Trump, Vladimir Poutine, ou encore le Premier ministre indien Modi. A cela on peut ajouter un autre succès historique, la visite du nouveau président brésilien Bolsonaro, qui est venu apporter un fervent soutien à Netanyahou. Mais surtout, le grand succès de Benyamin Netanyahou qui change la donne, c’est le soutien de l’Arabie Saoudite et de l’Égypte : il n’y a plus réellement de pays arabes qui s’opposent à lui. Il faut ajouter à ce tableau une percée israélienne dans le continent africain.
Jamais un Premier ministre israélien n’aura été aussi éloigné des critères de règlement du conflit israélo-palestinien, soutenu par la communauté internationale, mais jamais il n’aura eu le soutien aussi affirmé de dirigeants d’autres pays.
Aux précédentes élections, la question qui se posait était de savoir si les Israéliens étaient pour ou contre le processus de paix. Cette fois-ci, il s’agissait de savoir si les Israéliens étaient pour ou contre l’annexion, officiellement condamnée par la communauté internationale. Ce qui a peut-être fait pencher la balance en faveur de Netanyahou, c’est son engagement à annexer juridiquement les territoires occupés et donc à changer leur statut juridique.
Il ne s’est pas engagé sur l’ampleur de l’annexion ni sur le calendrier, mais c’est un geste très fort qui sera certainement le dernier clou planté dans le cercueil du processus de paix, déjà moribond depuis plusieurs années.
On peut d’ailleurs penser que cette annexion, comme celle du Golan, sera approuvée par Donald Trump. Celui-ci affirme depuis déjà plusieurs mois qu’il compte proposer un plan de paix « révolutionnaire ».
On en connaît les grandes lignes, c’est effectivement un plan de paix qui est inacceptable pour les Palestiniens, mais qui ravit Netanyahou et qui semble acceptable pour Mohammed Ben Salmane : annexion de Jérusalem reconnue, donc sans partage de la ville en capitale de deux États, palestinien et israélien, et puis surtout reconnaissance de l’annexion d’une partie de la Cisjordanie. Donc la perspective d’un État viable palestinien s’éloigne totalement et peut-être définitivement.
On pourra parler de paix, mais d’une paix par la force, une paix imposée, une paix qui n’est pas du tout acceptée. Le moins que l’on puisse dire c’est que la politique israélienne ne rencontre pas d’obstacles.
Certes, le mouvement palestinien n’est pas exempt de tout reproche. Il est en profonde déliquescence, avec un Hamas répressif, et un leader palestinien, Mahmoud Abbas, qui perd de plus en plus en légitimité. Ce dernier a été élu il y a maintenant 13 ans, et on peut dire qu’il est très contesté en interne. Mais Israël aurait tort de se réjouir de la déliquescence du mouvement palestinien. Cela peut lui servir à court terme, mais à long terme ce n’est pas rassurant.
Mais si la communauté internationale accepte bon gré mal gré la politique israélienne, il n’en est pas de même pour l’opinion publique internationale.
On est face au même antagonisme dans les pays arabes, les gouvernements, soit acceptent la politique israélienne, soit ne sont pas en mesure de lutter contre elle parce qu’ils ont trop de problèmes intérieurs, soit, enfin, parce qu’ils ont peur des États-Unis. Mais dans l’opinion publique arabe, la cause palestinienne reste encore un élément fédérateur et sacré. Elle constitue peut-être d’ailleurs un des rares éléments de l’unité arabe.
L’absence de perspective politique se traduit souvent par des violences incontrôlées. Depuis très longtemps, les Palestiniens font preuve de résilience, les Israéliens ont tort de penser que cette résilience est une résignation.