Je n’ai jamais entendu de récriminations à propos des sommes gagnées par George Clooney ou Julia Roberts. On n’a jamais organisé de débat à propos du scandale que représenterait les cachets de Placido Domingo. Les gains de Beyoncé ou les droits d’auteurs perçus par J.K. Rowling ne choquent personne. Mais lorsqu’on annonce que Neymar va être payé 30 millions d’euros par an, tout le monde s’offusque.
Ce qui est considéré comme la juste reconnaissance du talent dans le cinéma, l’opéra, le show-biz ou la littérature est jugé indécent pour le football. Pourtant, tous sont des stars mondiales. En termes de notoriété et d’engouement, Neymar n’a pas à rougir face aux autres.
Le football est à l’origine un sport populaire. Est-ce pour cette raison que beaucoup pensent qu’il est anormal d’être payé pour jouer ? C’était déjà le cas dans les années 80, alors que les sommes en jeu n’avaient rien à voir, ou encore dans les années 60, lorsque Raymond Kopa réalise un match moins abouti que d’habitude et que certains crient : « feignant, retourne à la mine ! « .
D’autres vont dire que les sommes gagnées par Neymar sont disproportionnées par rapport à ce que peuvent gagner les PDG de grands groupes internationaux. C’est tout à fait discutable. D’abord notons que Neymar ne fixe pas lui-même son salaire contrairement au PDG qui s’arrangent avec leurs pairs. Deuxièmement, en termes d’émotion et de plaisir procuré, Neymar dépasse largement les PDG.
Troisième différence, Neymar va créer des emplois en France, par l’argent qu’il va drainer, alors que souvent la rémunération des patrons de groupe est surement indexée aux délocalisations et aux emplois supprimés. Un footballeur aurait-il moins de responsabilités qu’un patron ? C’est également discutable. Tirer un penalty, dont va dépendre l’issue d’un match capital devant des dizaines de milliers de spectateurs et des centaines de millions de téléspectateurs, est bien plus stressant que d’arbitrer entre les différentes propositions de vos collaborateurs.
Depuis 30 ans, les meilleurs joueurs français partent de plus en plus rapidement à l’étranger. L’arrivée de Neymar amène, dans le championnat français, l’un des trois meilleurs joueurs au monde et avec de surcroit beaucoup de potentiel, puisqu’il n’a que 25 ans. L’attractivité de la ligue, aussi bien en France qu’à l’étranger, va être surmultipliée. Ceux qui aiment le foot ne peuvent que s’en réjouir. Ce sont ceux qui n’aiment pas le foot qui le déplorent.
Faut-il rappeler que grâce à Michel Platini, l’UEFA a établi la règle du fair-play financier qui empêche un club d’avoir un déficit supérieur à 30 millions d’euros. Le Qatar ne peut donc pas mettre autant d’argent qu’il le souhaite dans le PSG. Cela lui permet simplement de concurrencer les grosses écuries européennes.
Bien sûr c’est beaucoup d’argent. Mais c’est la loi du marché. Les footballeurs gagnent ce que le football rapporte. Les droits télévisés et les recettes de marchandising ont explosé. C’est pour cette raison qu’il y a des transferts plus coûteux et que les footballeurs gagnent toujours plus.
Il est important de rappeler que les sommes étaient bien plus faibles il y a quelques années. Mais le football est de plus en plus populaire et il s’est de surcroît mondialisé. C’est donc la loi de l’offre et de la demande qui s’applique. Ceux qui sont contre cette loi peuvent, en toute logique, être choqués par le salaire de Neymar. Mais ce qui se disent favorables à l’économie de marché et choqués par le salaire de Neymar sont tout simplement de gros hypocrites qui enrobent d’un discours moral leur mépris du football qui reste, quoi qu’il en soit, le sport populaire par excellence.