Interview de Pascal Boniface pour France info
Peut-on parler d’un nouveau départ dans les relations entre les Etats-Unis et la Russie ?
C’est la fin d’une dégradation des relations entre Moscou et Washington. Et sans que ce soit un nouveau départ avec une ère de coopération, on a limité la casse et l’on prend cette période d’apaisement entre les deux capitales, entre les deux chefs d’Etat qui ne s’étaient pas épargnés dans la période précédente, et qui ont décidé finalement de se mettre d’accord sur leurs désaccords et de sortir gagnants l’un et l’autre de cet épisode diplomatique.
Quelle différence fondamentale y a-t-il avec les relations qu’avait Vladimir Poutine avec Donald Trump ?
Donald Trump était très admiratif de Vladimir Poutine. Il lui faisait confiance. Il avait dit que Poutine lui plaisait. Sauf que, y compris pendant la période où Donald Trump était président, il y a eu plus de sanctions contre la Russie. Donc certes, il y avait un tropisme personnel de Donald Trump au sujet duquel certaines personnes s’interrogeaient : « Est ce qu’il y aurait des secrets sur Trump que Poutine aurait eu ? » Mais les bonnes dispositions et l’entropie n’ont pas changé la politique américaine. Et donc là, le fait que Biden ait une perception beaucoup plus négative de Poutine n’empêche pas de collaborer parce que Biden sait qu’il doit gérer quand même les États-Unis et que ce pays a besoin d’une coopération avec la Russie sur certains points, notamment sur la cybercriminalité et l’espace cyber.
Vous dites que les deux présidents sortent gagnants de ce premier sommet. Pour quelles raisons ?
Parce que Poutine parle sur un pied d’égalité avec le président américain, alors que la Russie n’a pas du tout la puissance des Etats-Unis. Et donc, Poutine recrée un peu le décorum dans lequel Moscou et Washington se parlaient d’égal à égal, ce qui n’est plus le cas. Et Biden quant à lui termine un marathon diplomatique, une sorte de Grand Chelem en quatre épisodes avec quatre levées : sommet du G7, Sommet Etats-Unis-Union européenne, sommet de l’OTAN et puis un dialogue bilatéral avec Poutine, au cours duquel il pourra dire qu’il n’a pas eu peur de dresser la question des droits de l’homme devant Poutine. Ce que Trump n’a jamais fait. Et pour Biden, faire la différence avec Donald Trump est toujours intéressant.