Les relations entre la France et le Maroc ont longtemps été considérées comme fluides, nourries, fructueuses, voire idylliques surtout comparées aux relations plus tumultueuses avec l’Algérie. Depuis quelques temps, des tensions sont apparues, menant à un certain désenchantement. Emmanuel Macron doit effectuer une visite au Maroc au cours du 1er trimestre 2023, destiné à relancer la coopération entre Paris et Rabat. Qu’est-ce qui a conduit à cette dégradation et qu’est-ce qui peut permettre une amélioration ?
Tout d’abord l’arrivée d’un nouvel Ambassadeur français au Maroc permet d’ouvrir une nouvelle page plus positive, l’Ambassadrice l’ayant précédé ayant crispé de nombreux Marocains.
De façon plus significative, la restriction du nombre de visas octroyés par la France décidée à l’automne 2021, présentée comme une mesure punitive du fait du refus des autorités marocaines de rapatrier leurs nationaux en situation illégale sur le territoire français, a provoqué l’incompréhension et la colère du Maroc. Elle a d’ailleurs suscité également des protestations en France, ayant été perçue comme une concession à l’égard de l’extrême droite. Il n’est jamais bon de mélanger politique intérieure et diplomatie.
Par ailleurs, la question du Sahara occidental restant une question existentielle et essentielle pour le Maroc, la position française sur le sujet est désormais perçue comme timide puisque tant les États-Unis que l’Espagne, ancienne puissance coloniale, ont totalement reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Les Marocains estiment que la France fait trop de concessions à l’Algérie, ce qui l’empêche de reconnaître pleinement la souveraineté marocaine.
S’agissant de l’affaire des visas, la France a reconnu avoir, notamment pour des raisons de politique intérieure, commis une erreur, et elle est revenue sur sa décision.
Sur le dossier du Sahara occidental, même s’il est vrai que la France entend améliorer ses relations avec l’Algérie, et que de manière générale ses relations avec Alger sont plus compliquées qu’avec Rabat, et qu’elle a généralement plus d’effort à faire à l’égard de l’Algérie, là n’est pas la raison de la position française. La France est tout simplement membre du Conseil de sécurité des Nations unies et elle ne peut pas se départir de la position globale des Nations unies sur le sujet. En réalité, il y a une certaine injustice du Maroc à l’égard de la France à ce propos, puisque la France avait soutenu le plan marocain pour l’autonomie du Sahara occidental, et que ce soutien s’était à l’époque révélé très précieux pour Rabat.
En tous les cas, ce qui est certain, c’est que le Maroc est beaucoup plus sûr de lui. Il se perçoit comme un pays exportateur avec une solide base industrielle qui peut servir de pont entre le monde arabe et le monde occidental, et de point d’entrée de l’Europe vers l’Afrique. Rabat n’est plus enfermé dans une relation bilatérale exclusive avec Paris si cela n’a jamais existé.
Le Maroc a multipolarisé ses relations diplomatiques et la France l’admet parfaitement, les relations entre les deux restent puissantes et a de nombreux égards inégales, mais la globalisation étant passée par là, chacun a de multiples partenaires.
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