Mon interview pour France urbaine à lire ci-dessous et à retrouver ici >>>
Les grandes métropoles françaises sont des acteurs de plus en plus importants de la diplomatie du Quai d’Orsay à l’étranger. Dans un monde où l’instabilité géopolitique prédomine, les villes ne sont-elles finalement pas la bonne échelle pour faire bouger les lignes ?
Plus personne ne peut nier le rôle des métropoles et des grandes villes dans l’action internationale des Etats. La composition des acteurs s’est diversifiée, les Etats ne sont plus seuls à faire de la diplomatie et ils en sont aujourd’hui convaincus, le Quai d’Orsay en premier lieu.
Les Etats ont eu longtemps le monopole mais ce n’est plus le cas aujourd’hui : toutes les grandes métropoles ont une direction des relations internationales dans leur organigramme, une stratégie à l’international. Coopération économique, humanitaire, environnementale, sociale, scientifique, attractivité touristique… la gamme est très large. Le rôle des métropoles est croissant et désormais reconnu.
La coopération décentralisée vient renforcer la place de la France dans le concert des nations, de la diplomatie internationale. C’est une coopération de personne à personne, de terrain, plus pragmatique. Les organisations de villes et les manifestations à leur initiative se multiplient, ce n’est pas anodin : C40 Cities, Jeux Olympiques, Exposition universelle, Forum urbain Mondial… Les villes ont un savoir-faire, une expérience et un message à faire passer.
Leurs élus sont des personnalités politiques de premier plan, qui sont en constante recherche d’échange de bonnes pratiques, de ce qui fonctionne ailleurs et qui pourrait les inspirer. Les grandes villes ne sont pas en concurrence mais en coopération, par le partage d’expérience, en réseau. Cela n’a plus rien à voir avec l’action internationale d’il y a vingt ou trente ans, où les collectivités locales pesaient peu, voire même considérées comme passives. La volonté des élus est réelle et cette tendance ne concerne pas que la France. Ce phénomène est visible dans tous les pays développés qui attachent de l’importance à l’influence, au rayonnement national au niveau mondial.
La crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 aura-t-elle des conséquences sur l’action internationale des grandes villes françaises ?
Il y a autant de réponses que de villes ! Chaque ville fera ses choix, selon sa stratégie, ses objectifs, l’appétence de ses élus. Il n’y aura pas de coup de rabot général et égal pour toutes les villes. Les moyens alloués seront peut-être moins importants du fait de la crise dans certaines d’entre elles. Mais la crise sanitaire prouve à l’inverse que l’action internationale en est le principal remède. Il faut avoir conscience du rôle indispensable de l’action internationale dans un monde globalisé, en mutation constante, aux menaces grandissantes et dans lequel nous sommes interdépendants.
Que manque-il aux grandes villes pour peser encore davantage dans les relations internationales ?
Il faut poursuivre les efforts engagés, réfléchir à ce qui fonctionne et ce qui pourrait être amélioré. C’est une réflexion à long terme. Je participe régulièrement à des événements internationaux ou sur l’action internationale. Je suis frappé du nombre d’initiatives qui fleurissent chaque jour dans le domaine. Le tissu est riche en France : Etat, collectivités, associations, ONG, citoyens…
Si la concurrence entre les Etats est de plus en plus vive et que les pays émergents ont aujourd’hui une action internationale qui se structure, il faut être vigilant sur une chose : la qualité de l’action. Le jumelage ne suffit plus, il est d’un ancien temps. Le contact personnel compte toujours mais il faut faire confiance aux nouveaux acteurs, qui ont des idées, des projets innovants à faire valoir et ce, dans tous les domaines, que ce soit dans la culture, le sport, le social, l’humanitaire. Les villes et leurs populations sont investies ! Il faut une adéquation et une coordination plus forte entre les villes, les associations et les ONG.
Le renouvellement lors des dernières élections municipales peut jouer un rôle, avec l’arrivée d’élus novices ou non professionnels de la politique. Ils apportent une expérience différente, complémentaire à celles de leurs collègues déjà élus auparavant. La diversité des profils des élus est une bonne chose. A l’heure de la globalisation, on ne peut pas ignorer ce qui se passe en dehors de nos frontières. Cela nous concerne tous. L’action internationale n’est plus une option, c’est une nécessité.