Le vendredi 3 juin, Paris accueillera une conférence internationale afin de tenter de débloquer le processus de paix – mais peut-on encore employer ce terme ? – entre Israéliens et Palestiniens.
Le but premier de cette conférence est de préparer le terrain, sur fond de promesses d’aide financière et de garanties sécuritaires, à des négociations directes entre Palestiniens et Israéliens. Seront ainsi présents John Kerry et Sergueï Lavrov, ministres américain et russe des Affaires étrangères, Federica Mogherini, en charge de la diplomatie de l’Union européenne, Ban Ki Moon, Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, ainsi que les ministres des principaux pays européens et arabes. Bref, un bel aéropage. Mais la réunion de toutes ces personnalités, représentants des plus grandes puissances, risque d’aboutir à un constat supplémentaire d’impuissance.
La tenue de cette conférence donne lieu à des sentiments ambivalents. On peut se féliciter de l’initiative française, qui refuse de laisser au point mort, dans une zone d’ombre, le dossier israélo-palestinien. Certes, la guerre civile en Syrie et l’État islamique sont des défis stratégiques plus brûlants et engendrant plus de victimes. Mais, contrairement à ce qu’essaie de faire croire le Gouvernement israélien et ses soutiens, la question israélo-palestinienne reste un sujet stratégique central dont l’importance dépasse largement le cadre régional.
La diplomatie française est moins active sur ce sujet qu’elle ne le fut dans le passé. Ce changement n’est d’ailleurs pas ultérieur à l’élection de Nicolas Sarkozy, qui revendiquait haut et fort son amitié pour Israël, ou de François Hollande, qui est revenu sur son engagement électoral de reconnaître l’État de Palestine, mais date de la fin du mandat de Jacques Chirac. Presque surpris par sa propre audace de s’opposer à la guerre d’Irak de 2003, la France avait adopté un profil bas dans les relations, tant avec les États-Unis qu’avec Israël, craignant les effets de la poursuite du French bashing aux États-Unis. Être moins actif qu’auparavant sur la question palestinienne faisait partie de cette stratégie. Mais, si la France est moins militante qu’auparavant, elle reste le pays occidental le moins inactif sur le sujet.
Il reste que cette conférence a peu de chances d’aboutir. La cruelle réalité est que Benyamin Netanyahou a affirmé très ouvertement à Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls, ministre des Affaires étrangères et Premier ministre français qui se sont rendus en Israël à deux semaines d’intervalle, qu’il s’opposait à l’initiative française. À la place, il propose des négociations directes entre Palestiniens et Israéliens. C’est un moyen de ne pas avancer, vu la disproportion des forces. Le Gouvernement israélien pense que le temps joue en sa faveur, que les Palestiniens s’habitueront à l’occupation et que la poursuite de la colonisation permet de grignoter les territoires palestiniens, rendant de fait impossible la solution à deux États. Netanyahou, à la tête du Gouvernement le plus à droite de l’Histoire Israël, dont de nombreux membres ont ouvertement affirmé qu’ils s’opposeraient à tout accord avec les Palestiniens, dit refuser tout « diktat international ».
Or, ni la France, ni la « communauté internationale », n’est prête à faire payer un quelconque prix de ce refus à Israël. Pourquoi, dès lors, changerait-il sa position intransigeante dont il ne subit aucune conséquence négative ? Netanyahou n’éprouve aucune crainte face aux autres puissances, et l’examen des évènements depuis qu’il est au pouvoir lui donne raison. Sa seule crainte provient des mouvements de l’opinion interne et notamment « Boycott Désinvestissement Sanction », qui prend de l’ampleur.
En face, les Palestiniens, qui sont politiquement et géographiquement divisés, semblent démunis et désemparés. Les Israéliens continuent, année après année, de mettre en œuvre le principe de l’ancien Premier ministre, Yitzhak Shamir, au début des années 90 : nous sommes prêts à négocier le temps nécessaire, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien à négocier.